Les affaires du COVID

Les affaires du COVID

11 février 2022 Non Par passamontagna

Publié sur NoCpr Torino le 2022/02/09

Deux ans se sont écoulés depuis le début de l’urgence liée à la propagation du virus COVID-19, et les mesures adoptées dans la gestion de la pandémie, en Italie comme ailleurs, ont montré que les seuls objectifs de l’État ont toujours été la sauvegarde de l’économie mondiale et un contrôle de plus en plus omniprésent.

Certaines dynamiques de la société, en relation avec la crise pandémique, ont été exacerbées, rendant encore plus évidente la brutalité des mécanismes de production fonctionnels au système capitaliste. Certains corps sont consommables pour les besoins de la production. D’une part, les travailleurs envoyés à l’abattoir dans les usines, qui n’ont jamais fermé malgré la cessation de toute forme de liberté autre que celle de la production, comme cela s’est produit dans les premiers mois de la pandémie. D’autre part, les migrants enfermés dans les cellules de détention, mal à l’aise en liberté, sont eux-mêmes une marchandise et une source de profit pour alimenter un système raciste, un business de la détention et de l’expulsion qui ne veut pas s’arrêter.

C’est le corps même d’un détenu dans le CPR qui est source de profit, puisque les entreprises qui profitent de la gestion de ces centres ont besoin de la présence d’un nombre minimum de personnes pour se déclarer productives et alimenter leurs profits. Ce n’est pas un hasard si, depuis mars 2020, date à laquelle certaines frontières ont été fermées, le système de détention n’a jamais été désactivé, ce qui démontre clairement que la rhétorique de sa fonctionnalité dans le seul but de l’expulsion n’est plus valable. Tout au long de la pandémie, des personnes sans documents européens ont été conduites dans des centres malgré l’impossibilité de les rapatrier. Pour certains, l’emprisonnement a été prolongé, pour d’autres, lorsque les termes légaux de la détention ont expiré, des ordres d’expulsion ont été émis.

Dans le même temps, les rapatriements forcés valident les investissements réalisés dans les accords entre États pour la sécurité des frontières. Par exemple, l’accord Italie-Tunisie de l’été 2020 prévoit l’allocation par l’Italie de 11 millions d’euros pour le contrôle des côtes et le rapatriement de 80 personnes par semaine. Cette vision des corps emprisonnés comme monnaie d’échange dans les flux économiques internationaux est devenue encore plus évidente pendant la pandémie. En effet, lors des différentes vagues, il y a eu un mépris total et délibéré pour la santé des personnes détenues et la prévention de la contagion. Les outils de diagnostic, qui n’ont pas été utilisés pour endiguer l’épidémie, n’ont été utilisés de manière obligatoire qu’à des fins de rapatriement, garantissant le nombre minimum d’expulsions nécessaires pour alimenter le commerce entre les États.

Dans le labyrinthe de décrets et de règles avec lesquels la vie de chacun d’entre nous a été mise en échec, la gestion punitive de la pandémie a dicté les règles, décidant qui avait droit aux libertés fondamentales telles que le mouvement et le traitement. A l’extérieur des murs, la discipline vaccinale est l’aune à laquelle se mesure l’accès à la vie sociale et professionnelle, et l’accès à certains moyens de transport. Les personnes emprisonnées au sein du CRA ne peuvent pas choisir d’accéder ou non au vaccin, car il ne leur est pas fourni. En effet, la productivité d’un corps emprisonné, au sein du système raciste et colonial, n’est qu’une marchandise et il n’y a donc aucune utilité économique à vacciner.

Les conditions de vie déjà horribles dans la CRA ne font qu’empirer avec l’absence habituelle de traitement et de prévention de l’infection par le Covid-19. Depuis les prisons Lorusso et Cutugno de Turin, nous recevons également des informations sur l’augmentation des contagions, l’absence d’outils de protection individuelle pour les détenus et le manque de soins pour les malades. Dans ces deux centres, comme dans d’autres, la dynamique est toujours la même. La négligence évidente avec laquelle la question de la pandémie, ainsi que la santé plus générale des détenus, est abordée n’est pas une simple coïncidence. Il s’agit plutôt de l’une des formes matérielles que prend la violence punitive du système de détention. Et tandis qu’à l’extérieur, quelqu’un s’enrichit sur la peau des gens, à l’intérieur, les conditions de vie sont, comme toujours, épouvantables. En effet, à ce jour, tous les détenus à l’intérieur du CPR de Corso Brunelleschi sont en quarantaine dans les trois seules zones accessibles et le garant régional des personnes privées de liberté Bruno Mellano a mis trois ans pour se rendre compte de l’absence totale de soins de santé valables à l’intérieur du centre, sous la gestion de GEPSA jusqu’en février.

Selon des informations récentes, plusieurs entreprises sont en concurrence pour la gestion du CPR de Corso Brunelleschi. Ce n’est pas un changement de direction ou une plus grande attention portée aux soins de santé qui rendra un tel lieu plus humain. Mais seulement la destruction des centres de détention administrative et la suppression de toutes les frontières.

TOUS ET TOUTES LIBRES